Ce soir et cette nuit, une tempête hivernale est annoncée sur la moitié nord de la France. Météo-France a placé 53 départements de la moitié nord en vigilance orange vent violent, dont 14 qui sont doublés d’une vigilance orange neige / verglas, du nord des Pays-de-la-Loire aux Ardennes en passant par les côtes de la Manche.
~ Mise à jour à 16h15 ~
La Seine-Maritime, l’Oise, la Somme, l’Aisne et les Ardennes sont placées en vigilance rouge vent violent : une tempête extrêmement violente est prévue.
On se penche plus en détails sur cette situation particulièrement agitée qui est en train de se mettre en place.
Les risques en résumé
En fin d’après-midi, des rafales jusqu’à 120km/h vont arriver sur les côtes bretonnes et les côtes de la Manche. Ce vent violent va progresser vers l’Allemagne, en s’intensifiant rapidement au cours de la nuit. C’est pour cette raison que cette tempête est inhabituelle : les vents pourront être plus violents sur les terres que sur les côtes, avec des rafales jusqu’à 140km/h sur la Seine-Maritime, les Hauts-de-France et les Ardennes. Plus généralement, ce sont toutes les régions au nord d’une ligne Charente-Maritime – Jura qui pourront connaître des rafales de plus de 100 km/h. Une attention toute particulière devra être apporter de la Normandie au nord de la Lorraine et notamment dans les Hauts-de-France, où les rafales dépasseront facilement 120km/h dans la nuit.
Ce vent violent va être précédé par de la pluie, très abondante sur la Normandie, les Hauts-de-France et les Ardennes. Une fois cette perturbation pluvieuse passée, des averses vont fréquemment se déclencher par la suite. Dans un air nettement plus froid, ces averses se feront le plus souvent sous forme de neige. La pluie tournera à la neige en début de nuit sur les Hauts-de-France, pouvant laisser une couche de 1 à 5cm de neige au sol. De la Manche à la Lorraine, les averses de neige pendant la nuit et la matinée de vendredi pourront aussi laisser localement quelques centimètres de neige au sol.
Les délicatesses d’une bombe météorologique
Cette situation météorologique est un peu particulière et mérite une vigilance prononcée. La plupart des tempêtes hivernales qui touchent la France sont déjà formées sur l’océan, et assez prévisible. Dans ce cas précis, la dépression n’est presque pas encore formée : la pression va très rapidement chuter directement sur la France. Il s’agit probablement d’une « bombe météorologique« , une dépression qui se creuse fortement en seulement quelques heures. Tous les éléments sont en place pour une cyclogenèse de ce genre : un courant jet assez fort en altitude, orienté du nord-ouest au sud-est, de l’air chaud en amont et une anomalie basse de tropopause juste à l’arrière.
- Prévision de pression et géopotentiel pour jeudi à 10h – modèle ARPEGE 12/01/17 06h
- Prévision de pression et géopotentiel pour jeudi 22h : en seulement 12h, une dépression très creuse s’est formée et est centrée sur les Hauts-de-France. Modèle ARPEGE, 12/01/17 06h
Les bombes météorologiques portent bien leur nom, car elles peuvent produire des vents tempétueux à une échéance très courte. Comme ces dépressions se forment très rapidement, leur prévisions est plus complexe : les observations directes ne peuvent pas être d’une grande aide dans la mesure où la situation va rapidement changer, et seules les modélisations permettent d’évaluer les caractéristiques d’un objet météorologique qui n’existe pas encore.
Le développement de cette bombe météorologique se joue à peu de choses : il suffit que les paramètres ne soient pas bien phasés, et « la mayonnaise ne prend pas ». Pour cette tempête, Météo-France semble faire confiance à ses modèles à maille fine qui voient cette dépression se creuser très rapidement sur le nord de la France, alors que d’autres modèles ne voient pas de vents si violents.
- Rafales en surface prévues à 18h (modèle ARPEGE 12/01/17 06h)
- Rafales en surface prévues à 22h
- Rafales en surface prévues à 00h
- Rafales en surface prévues à 2h
~ Mise à jour à 16h15 ~
Dans sa dernière modélisation, ARPEGE renforce encore le scénario d’une bombe météorologique, produisant des rafales encore plus puissantes sur les Hauts-de-France, pouvant atteindre 140 km/h.

Prévisions des rafales maximum jusqu’à vendredi matin : des rafales jusqu’à 140 km/h seront possibles sur les Hauts-de-France. (Modèle ARPEGE 12/01/17 12h)
Il y a donc toujours une part d’incertitude dans cette prévision, mais la vigilance semble en tout cas amplement justifiée. S’il est possible que ce soit une fausse alerte, les développements envisagés par les modèles météo placent le nord de la France, et en particulier les Hauts-de-France dans une situation dangereuse : le modèle ARPEGE laisse envisager des rafales à 130km/h dans les terres. Combinées à des précipitations qui tournent à la neige, le nord de la France pourrait bien vivre un petit blizzard.
- Précipitations prévues à 23h : la pluie tourne à la neige sur les Hauts-de-France, dans le retour d’occlusion. (Modèle ARPEGE 12/01/17 06h)
- Précipitations prévues à 2h : des averses de neige circulent entre la Manche et le nord-est.
Enfin, ce changement brutal de températures suivi d’un air instable laisse envisager aussi de possibles orages de neige, notamment sur les côtes de la Manche.
~ Mise à jour à 19h45 ~
Quelques précisions techniques ! Pourquoi parlons-nous de bombe météorologique ? Ce terme correspond à une classe de dépressions dont le développement est très rapide et virulent. Les tempêtes de 1999 en sont les exemples les plus connus. De telles dépressions se creusent d’environ 24hPa en moins de 24h et ont une différence de température (baroclinie) généralement supérieure à 12°C entre l’avant et l’arrière du front associé. Concernant Egon, le creusement modélisé par ARPEGE est supérieur à 22hPa en seulement 12 heure et la baroclinie est de l’ordre de 8-10°C. Sur la précédente modélisation on était à 27hPa en 12h ! On est donc bien dans un creusement dépressionnaire explosif. Encore une fois, cela justifie parfaitement l’alerte tempête donnée par Météo France, le développement pouvant être sous-estimé.
- Dépression modélisée par ARPEGE à 14h : 1001hPa
- La dépression seulement 8h plus tard : 979hPa